mardi 12 novembre 2013

Musics Of My Life #4 - War [U2]

Pochette

Pochette interne

Pochette externe

1984 : mon pote de collège me dit un matin, avant d'entrer en cours : 
- tiens, je t'ai apporté un disque que mon frère vient d'acheter. Tu connais U2? 
- euh... non 
- c'est génial, écoute 

Avant d'écouter, j'ai vu. J'ai vu ce gamin qui me regardait fixement, d'un air méchant... mais pas vraiment, un air indéfinissable, en noir et blanc... flippant.
C'était une double pochette (comme on en faisait des merveilleuses avant l'invention du petit disque monofacisque). En l'ouvrant, sur le coté externe, on comprend mieux. Le gamin a les mains sur la tête, et j'imagine tout de suite et tout de suite que, sans doute, il a un fusil braqué sur lui.
Photo horriblement magnifique. 
En rentrant chez moi je mets le 33 sur la platine. Ah ben oui, je connaissais, évidemment, c'est de eux, ça? "Sunday Bloody Sunday" ..... et ça aussi? "New Year's Day" ? 
ah ben oui alors j'aime. 
Oui la face A est extraordinaire, avec un final à tomber.
Tout le monde connait les 2 titres précités, je ne vais pas faire l'affront de les mettre en écoute. En revanche, le morceau qui se situe entre ces 2 mégas tubes n'est pas connu et est fantastique. "Seconds". Sur un tambour marquant d'un manière martiale un rythme, bientôt rejoint par une guitare grattant 1 accord, puis une basse répétitive, vient une mélodie qui semble guillerette, comme une comptine, mais lorsqu'on se penche sur les paroles, on comprend que la chanson ne l'est pas du tout, et parle de guerre, de bombes, et qu'il "suffit d'une seconde pour dire au revoir".



[2. Seconds]



"Like A Song..." est un morceau marqué, encore une fois, par la batterie, mais beaucoup plus rageuse, hargneuse, qui colle très bien au chant écorché de Bono et des guitares plus que déchirées de The Edge.



[4. Like A Song...]


Bizarrement, je n'ai jamais vraiment accroché avec "The Refugee", peut-être le son un peu trop "brut", je trouve que ça sonne creux, un peu trop métallique, je sais pas. J'ai appris à l’apprécier  je ne la zappe plus lorsque c'est son tour, mais je trouve que c'est la moins bonne de l'album. Je lui préfère (ok, plus évidente) "Two Hearts Beat As One" avec ses cymbales hyper speed et dansantes.



[7. Two Hearts Beat As One]



"Red light" a une intro superbes et je l'aime bien, avec des passages où la guitare s'arrête, ce qui fait ressortir la voix. 



[8. Red Light]



"Surrender" est sublime , tout en douceur et en retenue, avec des guitares et des choeurs qui ondulent comme des vagues.



[9. Surrender]


Final comme une prière... 



[10. "40"]


Alors oui j'aime cet album.

Dans la semaine j'ai acheté le mini album live "Under a blood red sky", que j'ai prêté à mon pote, et qui me la rendu rayé, l'enf... 

Et j'ai aimé ce groupe (sans doute LE groupe de mon adolescence, parce que en activité, contrairement aux Beatles ou Pink Floyd) pendant longtemps... 
C'est un album qui est maîtrisé de bout en bout et qui prouve qu'à une époque, oui, U2 était un groupe de rock. Depuis leur premier disque ils n'ont cessé de progresser et le feront de manière constante jusqu'à "Achtung Baby", puis, à mon sens, ce fut un peu/beaucoup la déchéance.

PS : pour l’anecdote qui intéresse personne, cet album faisait partie de mon "mur-disque". J'accrochais aux murs de ma chambre certain disques "double pochette" que je trouvais fantastique.

mardi 5 novembre 2013

Musics Of My Life #2 : III (Melt) [Peter Gabriel]


Pochette Recto

Pochette verso



1987, 16 ans, le lycée. Je discute encore et toujours musique avec mon pote Christophe G. (s'il passe par ici en lisant ces lignes, il se reconnaîtra et je le salue.)

Il me dit qu'il adore Peter Gabriel. Oh, moi aussi... enfin, j'ai l'album "SO", et comme autre chanson de lui je ne connais que "Solsbury Hill" qui est une merveille. Oui, c'est vrai, a fait pas lourd. 

- "Ok.... demain je te porte un truc..." 

Il tint parole. Il me refile une K7 o je vois une des pochette des plus étranges que j'ai vues. Un visage semble tre devant une vitre avec des gouttes qui... non... en fait c'est SON visage qui coule, dégouline, fond.

Une pochette non pas faite en noir & blanc mais en cauchemar... 

Je reste la regarder, cette pochette, et pendant plusieurs minutes, pour essayer d'apprivoiser la peur qu'elle a engendre en moi, le malaise, accentué par cette chemise et ce décor derrière. (C'est quoi? il est o?). 

Je ne crois pas avoir revécu une sensation de ce genre. Beaucoup de pochette d'album m'ont plu, énormément... mais jamais m'ont dérangé de la sorte. 

Dérangé et attiré... 

Il fallait que je plonge... K7 dans walkman, écouteurs sur les oreilles, on ferme les yeux... 



Tout commence par ce rythme tribal, violent qui vient me frapper aux tempes. a dure 6 secondes. Jusqu'ici tout va bien.

Puis un bruit, un grincement (quelqu'un se lve d'un lit?) qui se rpte et met mal l'aise. Non, quelque chose qui se tort... qu'on tort... qu'on force. 


Et le piano-synthé, notes martelées, mélodie déchire, accords plaqués rageusement... 


Et des chœurs venus d'on ne sait où, déformés par les synthés, désincarnés...


Et une voix d'outre-tombe, encore avec une mélodie plus que déchirée car semble inexistante et fausse...


Et jusqu'au "pont" avec un xylophone. Bon sang, ce xylo, il a une vie propre? il intervient sans qu'on le lui demande ! 

Et tout ça, toutes ces notes "fausses" hors grilles, a forme la chanson la plus violente et extraterrestre que j'ai entendue jusqu'alors. Rien de connu quoi me raccrocher. 

La chanson finie, j'ai arrêté la machine. Ai pris une grande respiration, "Rewind" et me la suis repasse. 


[1. Intruder]

Et j'ai écouté l'album d'affilée cette fois ci. 

Même si le reste sonnait plus juste et rock, ça ne ressemblait rien de connu. A part le refrain de "I don't remember", tout me semblait étranger. Comme un explorateur qui dcouvre une terre inconnue, il ne comprend rien ce qu'il voit, mais il reste là pour comprendre.

Quelques jours aprés je lui ai rendu sa K7. 

- alors, a t'a plu? 
- euh ouais 

Non, ça ne m'avait pas plu dans le sens classique tu terme mais j'ai appréci découvrir cet OMNI (Objet Musical Non Identifié). Ces sons m'avaient intrigué, perturbé. C'tait trop nouveau d'un coup. Mais je comptais approfondir cette coute. J'avais fais une copie (eh ouais j'avais une chane double K7) et l'ai rcout pendant des jours, des mois, des annes. Jusqu' en connaitre les sons, les rythmes, et les aimer. 

Avec le temps j'ai pu avoir tous ses disques et je peux le remettre sa place : son 1er chef d'oeuvre. Aprés son excellent premier album ("Car") qui était encore fabriqué avec une criture trop proche des '70, il a cherché à créer des sons nouveaux, une musique nouvelle. Il avait essayé dans son deuxième album, surnommé "Scratch" (la pochette est déchirée par ses doigts) mais avait échoué : trop hésitante entre toujours une vielle écriture ("Mother Of Violence" semble être une face B des Carpenters et "Perspective" sonne comme un rock de Bowie époque "Ziggy") et des tentatives nouvelles avec l'aide de synthétiseurs, mais l'ensemble semble être des fonds de tiroirs de "Car", un peu maquillés. Seul "Exposureest sauvé.
Ce troisième album nous apparat comme extrêmement novateur et éminemment maîtrisé de bout en bout, tant au point de vue instrumental que vocal. Il a sans doute fait des voyages en Afrique pour imprégner autant de ses rythmes et retranscrire de la Musique, le Rythme.

Beaucoup de morceaux sont "distordus" par les mélodies, certains effets de voix passés à la moulinette de l'ordinateur et des synthés donnent des effets inouïs (dans l'introduction d'Intruder, que Tears For Fears piquera pour faire "The Hurting" ou dans les refrains de "No Self Control").



[2. No Self Control]

Apres un rapide et magnifique saxo instrumental ("Start") on enchaîne avec "I Don't Remember" et son refrain qui colle la peau et qui sent l'oppression.


[4. I Don't Remember]

"And Through The Wire" est le morceau peut-être le plus classique dans le sens où c'est un rock sans surprise dans sa conception mais les parties vocales sont métalliques, corches.

"Lead A Normal Life" est d'une pureté cristalline et arienne comme un rêve tout en douceur porté par quelques notes de piano.

Et évidement, l'universel "Biko" qui termine l'album.


[10. Biko]

Son 1er chef d'oeuvre, donc, et chaque album suivant sera meilleur que le précédent. le 4 ("Security") enfoncera le clou de l'Afrique et un on ne peut plus tribal "The Rhythm Of The Heat".  "So" est magnifique, "Us" est une perle, "Up" est un diamant.

Tout dans cet album est rythmique, sombre et puissant.

Un chef d'oeuvre, vous dis-je...

dimanche 3 novembre 2013

Musics Of My Life #1 - Spirit Of Eden [Talk Talk]


Pochette

Pochette verso

En 1989, ma copine de l'époque me dit : 
- "Tiens, toi qui aime Talk Talk, tu devrais écouter leur dernier album, ma sœur l'a acheté et elle aime bien".

J'ai connu ce groupe (comme tout le monde en ce temps) avec "Such a shame" (qui est sans doute LE titre des années 80) et j'avais l'album, ["It's My Life"], qui me plaisait beaucoup.

Puis ils ont fait "Colour of Spring" que je considérais comme le plus bel album des années 80 (avant que Tears For Fears ne sortent leur "Seeds of Love". Album sublime avec une composition d'une richesse vertigineuse).

Alors elle me le conseilla. Je l'écoutai... et failli le jeter par la fenêtre mais j'était trop occupé à vomir.

"C'est pas possible?? c'est quoi ce truc??!! c'est nul !!"

Je n'adhérai absolument pas à cette suite de sons, ce morceau qui dure 20 minutes sans réelle mélodie, sans véritable refrain, bruits éparpillés. La suite des titres ne relève pas du tout le niveau de mon impression : plat, tout le long c'est plat.
Seul point positif : la pochette. Elle est jolie, mais bon...
Pour tout dire : ennuyeux.

... [années qui passent]...

Je pars faire des études de musicologie, découvre la musique contemporaine, le jazz, le dodécaphonisme.... j'ouvre un peu mes esgourdes, quoi.
Je comprends que la musique peut-être faite d'une autre manière. Qu'elle existe sous une multitude de formes, et découvre l'importance du silence..

Puis je retombe (quelque chose comme 10 ans plus tard) sur ce même disque, chez un pote. Je suis frappé par ce qui m'avait, sans doute, échappé à l'époque (ou en tout cas je devais être trop choqué par l'Audio pour porter véritablement attention au Visuel et l'ai mis de coté) : le coté artistique de cette pochette. Le dessin est fait, tout comme les précédents, par James Marsh, et est sublime. Cet arbre qui semble flotter sur l'eau (océan infini? Début de l’apparition de la Terre après un raz de marée?) et portant sur ses branches des coquillages apporte à la fois quelque chose d'incongru et de poétique, comme une nouvelle voie dans notre imaginaire. Cette nouvelle voie, Talk Talk la trouve en créant des hybrides de sons et des chimères de chansons.
et je demande, par curiosité, à l'écouter (voulant le redécouvrir).

Et là, c'est une claque sonore que je me prends. Une longue introduction avec comme premier son une trompette. Une note. Venue de nulle part, ne semblant pas avoir de début et est rejointe par des cordes (violon, contrebasse). Ces instruments ne jouent qu'une note, longue, étirée, allant au bout de leur souffle jusqu'à ce qu'on entende une seconde note de trompette. Puis un piano. Aucune mélodie n’apparaît. Tout est constitué de phases successives d'apparitions d'une ou deux notes de chaque instrument. Le tout relié parfois par des ambiances bruitistes, des sons étranges, une atmosphère irréelle.
Puis à 2:15, apparaît une guitare qui parle (prononce plusieurs notes, certaines en même temps, on entend des accords) : le Temps est né.
Batterie...
Une lenteur pesante, ponctuée d'une batterie grasse et imposante. La voix de Mark Hollis est cristalline et fragile, aérienne.

Cette introduction étirée et sans forme me fait penser à la création du Monde, à partir du néant, tout apparaît en germe, pour se reconstituer en entité, et, tout comme la Nature est remplie de vide, la Musique de Talk Talk est remplie de silence.
Jamais il ne m'est apparut aussi important, pesant.
Existant.




1.1. The Rainbow

Après The Rainbow, et une autre partie instrumentale et atmosphérique, débute sans coupure, Eden, qui est encore un peu plus lent que la partie précédente. Un refrain comme une supplique "Everybody needs someone to live by..."



[1.2. Eden]

La troisième partie commence comme a commencé la deuxième, après un passage de brouillard sonore, avec 2 notes de guitare sur 1 seul accord, avec une voix seule accompagnée d'un nappe de synthé... et des timbales qui grondent dans le lointain. Et c'est alors que tout explose et qu'on comprend que ce qu'on prenait pour de la lenteur n'était en fait que de la retenue, un feu qui ne demandait qu'à prendre, une rage qui ne demandait qu'à naître.
Un flot de percussions et une guitare folle viennent séparer deux irruptions de refrains.


[1.3. Desire]


Les trois parties que forment ce premier morceau (ou les 3 premiers morceaux qui forment cette première partie) durent plus de 20 minutes et forment une oeuvre monumentale.

Pour le reste, soit 3 autres morceaux, on assiste à une disparition, une évaporation musicale, tout se disloque et tend à se structurer en moins en moins d'instruments. 
Il nous reste encore une superbe mélodie avec Inheritance qui finie en nous laissant comme en lévitation après ces derniers mots : "Heaven bless you", une phrase mélodique coupée en plein vol pour nous abandonner sans qu'on s'y attende.

[2. Inheritance]

Puis vient un morceau où il semble n'y avoir qu'un accord, ou pas du tout. Juste une guitare qui accompagne la voix, qui tourne autour d'une note. Puis lorsque apparaît le refrain, c'est une élévation subite, par les la mélodie, la musique, les chœurs... on touche au divin...

[3. I Believe In You]


Et un final moribond, agonisant, sur encore aucune mélodie identifiable.
[4. Wealth]

On est pas sérieux quand on a 18 ans, on ne connait pas grand chose et on passe à coté de chef-d'oeuvre.